Un petit chapeau aux couleurs fanées sur la tête, ce matin-là, comme chaque matin, tenant à la main son cabas duquel dépassaient poireaux, fanes de carottes et plumes de volaille fermière - c'était jour de marché - Albertine Parut poussa de toutes ses forces la lourde porte de l'église, franchit le ...
Une guerre civile est imminente.... Le pays est fracturé. Des rebelles communistes ont envahi la capitale. De nombreux affrontements entre les deux partis opposés déchirent la ville. Beaucoup d'habitants ont fui ; d'autres se cachent , impliqués dans la cause politique...
Il est jeune .... Presque un gamin qui se tient debout, au milieu de la rue désertée. Le bas de sa chemise à carreaux se soulève un peu.
La lumière est crue.
Sur la droite, des immeubles longent la rue. Les balcons sont vides. Pas de trace de vie.
Au loin, se détache un grand bâtiment blanc. Des petites ouvertures semblent être des fenêtres.
Soleil au zénith. Luminosité aveuglante.
Sur le sol, des ombres déposées par les arbres qui longent le côté gauche de la rue.
Haut dans le ciel, deux nuages transpirent dans la chaleur brumeuse.
Il est jeune, au milieu de la rue désertée. Pas d'autos, pas de piétons, pas de vélos, pas de chiens.
Derrière lui, loin derrière, un tank remonte l'avenue. Il avance seul en direction du jeune homme qui a les mains derrière le dos, comme attachées. Il plisse les yeux ; une partie de son visage est dans l'ombre. Il semble suspendu entre là et l'ailleurs.
Pointé vers sa tempe, un revolver.
Un homme de dos, le visage tourné vers lui, Un doigt sur la gachette,
Totalement un dans ce geste glacial dirigé vers ce visage, vers le jeune visage tétanisé dans un spasme.
En une fraction de seconde, il revit le visage de Maï Lin.... Marchant pieds nus entre les pousses de riz, marchant vers lui avec ce sourire si doux, si doux.... Il s'effondra sur l'asphalte dans un bruit sourd. Son visage recouvert de sang comme un linceul.
Il était jeune, presque un gamin, qui gisait là, seul, au milieu de la rue désertée.