Sa déambulation baroque, colosse barbu porté par son caddy, animait tout le quartier. Je craignais son apparition, démarche incertaine, marin bousculé par une mer houleuse. Il fendait sans un regard le flot des voitures, capitaine au long cours à la recherche d'un port d'attache, insensible aux clam...
Rides creusées. Béance du regard. Ta silhouette arrondie trahit le modelage du temps. Ton dos ploie. Démarche chaotique, lancinante, lente qui laisse ta trace sur le tapis usé. Pour horizon définitif la porte de notre chambre devenue tienne et dont tu m'interdis le seuil. Drame intime aujourd'hui dépassé. Ta voix lointaine, impérieuse, tranchante souvent, touchante parfois. Tu as perdu toutes ces nuances qui peignaient chaque instant d'un éclat différent. Jusqu'à ta mise qui s'est ternie. A quoi songes-tu le regard vide, au bord du tapis ? Ta souffrance au bord des lèvres. Toi si gazelle, si biche dans la forêt de ton quotidien, tu as vieilli sans désemparer. De tes pas il ne reste plus rien qu'une empreinte de silence, de tes caresses une austère volupté.
Une vitre s'interpose à présent entre toi et moi. Un vilain reflet ampute en partie ton corps déjà si déformé, trace comme un grand vide impossible à combler. Tu retranches à dessein ce que je peux encore percevoir. Tu m'ôtes toute prise pour me punir de t'avoir laissé t'éloigner. Tu t'effaces, éperdument indifférente.