Sa déambulation baroque, colosse barbu porté par son caddy, animait tout le quartier. Je craignais son apparition, démarche incertaine, marin bousculé par une mer houleuse. Il fendait sans un regard le flot des voitures, capitaine au long cours à la recherche d'un port d'attache, insensible aux clam...
Je vous ai monté un bateau
Dans quelle galère me suis-je embarquée ? C'est un voyage au long cours que cet exercice et je ne me vois pas sur le frêle esquif de mes connaissances pour le mener à bien. Comme sur une chaloupe ou plutôt un radeau, je me lance avec hésitation. Cette coquille de noix, le vieux rafiot de mes rudiments littéraires, tangue et me ridiculise. Mais j'ai quitté la rive et sur mon caboteur, je tiens bon…A moins que ce ne soit un dragueur, une gabare, un kayak ou plus simplement une barque ou un canot. En tout cas, il ne s'agit pas d'une péniche ni d'un chaland ; encore moins d'un cargo ou d'un paquebot transatlantique.
Cependant, tout en évitant le naufrage, où puis-je pêcher des idées ? Peut-être si j'empruntais un crevettier, trouverai-je quelques bribes à écrire mais quitte à choisir un chalutier, j'opterais plutôt pour un harenguier : qui sait s'il ne m'inspirerait pas une harangue bien sentie ? Sardinier, morutier, langoustier, thonier, baleinière, tout cela vaudrait mieux que d'aller à la dérive sur un vaisseau de tourisme, un vapeur ou un yacht…Mal m'en a pris de monter sur unepirogue : j'aurais bien dû prévoir que ce n'est pas sans risque que l'on confie sa vie à une telle périssoire…
…Il me faudrait un bathyscaphe pour approfondir un peu ce discours au lieu de me laisser porter au gré de ma fantaisie comme une balancelle sur les vagues ou un voilier, jouet de la brise…Un bombard ou un brick mieux encore qu'un drakkar ou une canonnière, un torpilleur, un cuirassé, bref, un bâtiment de guerre ne serait pas de trop pour venir à bout des écueils de mon ignorance. Oui, je m'appelle le dreadnought et n'ai donc pas eu peur de vous mener en bateau.