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Le "Voyageur sur terre" est un recueil de quatre nouvelles découvert parmi les lectures de textes fantastiques que j'écume depuis plusieurs semaines : le fantastique est l'un des premiers thèmes de cette nouvelle année d’ateliers. Que ce soit au travers de romans, nouvelles ou livres théoriques, je m'y suis plongé avec, je dois le dire, une certaine volupté. On entre dans ce recueil comme dans un brouillard. Green...

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Atelier superposition des temps Atelier Superposition des temps

Le bureau de l'éditeur était meublé avec simplicité. Un pupitre portait mon manuscrit qu'il était en train d'étudier, un crayon de papier posé sur le rebord. A côté, un ordinateur portable était ouvert sur un bureau droit, sans tiroir. Une bibliothèque, appuyée contre le mur face au bureau, contenait l'ensemble des livres qu'il avait publiés. Une fenêtre à simple vitrage donnait sur le jardin et le verger. Un poêle à bois complétait l'ameublement. La pièce aurait été austère si elle n'était habillée sur l'ensemble des trois autres murs par des étagères toutes chargées de voitures miniatures, de toutes les époques, toutes les couleurs, mais toutes à la même échelle.

Mon regard glisse sur les carrosseries et s'arrête sur une Jaguar type E. Elle est rouge. La mienne était grise. Avec son capot avant si allongé. C'était la voiture que « j'aurai quand je serai grand ». Je la place toute à la fin de l'immense embouteillage que j'ai méticuleusement préparé avec en tête les camions Berliet et le bus Saviem. Ensuite, la 404 avec sa caravane, puis toutes les autres petites voitures. La Jaguar va devoir remonter toute la file, en de folles accélérations rageuses que je bruite avec ma bouche.

Jean-François, range tes jouets Jeannette et Michel viennent manger ce midi, il faut libérer la table. Je dois renoncer à contre cœur à ma course folle. Je range mes voitures.

Ce sont toutes des Norev, échelle 1/43, made in France, la première éditée a été une Citroën 15 Six de 1955. Je n'ai pas pu l'acquérir, se plaint l'éditeur qui s'est approché de moi, il m'a vu admirer sa collection. J'en ai 734, il en semble plus fier en cet instant que de sa bibliothèque de livres publiés. Cette collection n'a pas de prix !

Le prix, c'était cinq francs, ma valeur étalon. La pièce est presque aussi grande que ma main. Maman me l'a glissée solennellement. Tiens. Je viens de lui remettre mon bulletin mensuel. Je suis premier. Alors cinq francs pour aller m'acheter une petite voiture chez le marchand de journaux au bout de la rue, chez Madame Blottiau, magasin improbable de bric et de broc, de journaux, de bazar et de voitures Norev rangées dans leur boite carton avec façade en papier glacé transparent. Ma tête dépasse à peine du comptoir, je tends ma pièce, et je désigne du doigt la voiture convoitée. Celle-là ? Non, celle à côté. Merci.

C'est un petit garçon, en culotte courte, cheveux bien rasés dans le cou et autour des oreilles, cette même émotion, ce même désir. J'ai commencé avec une Peugeot 203 que ma mère m'a achetée quand j'ai été hospitalisé suite à une pneumonie. Je crois bien que je n'avais jamais reçu de jouets jusqu'alors. L'éditeur a la voix qui tremble pour raconter cela. Peut-être est-ce la raison de cette collection, cet alignement si sage.

Mes voitures à moi étaient rangées dans un carton sous le lit, bien garées comme un Tetris de garage. Jeannette et Michel, je les aime bien mais j'aurais préféré finir ma course de Jaguar sur la table de la salle à manger. Mes voitures roulent, foncent, ont des accidents, font des dérapages, elles n'ont plus leur boites carton papier glacé, elles ont des roues de travers, parfois plus de roues, parfois des portières en moins. Elles jouent leur vie.

L'éditeur, lui, ce qui compte, c'est l'état impeccable, c'est cela la préoccupation du collectionneur. Vous voyez, pour certaines, j'ai encore la boite d'origine avec le ruban adhésif qui n'a pas été défait. Neuve comme sortie du magasin, mieux même, sortie de l'usine !

Je déambule, je frôle du regard tous les modèles, les ambulances, les camionnettes, les breaks et les berlines. Je me fige. Devant moi, la Norev, 1/43 de la Citroën Ami 6, 1965.

Elle est là. Devant moi. Tu veux gagner 5 francs ? Le prix d'une voiture de chez Madame Blottiau. Oui, Papa. Je sais ce que je dois faire. Je vais chercher le seau, les éponges, la grosse marron et la plus fine jaune. Prendre la peau de chamois, le produit spécial lavage voiture, grandeur nature. Je vais laver l'Ami 6 de Papa. Un coup de jet d'eau pour commencer. Puis savonner avec douceur, mais fermeté. D'abord les vitres, les phares, puis du haut vers le bas. Bien rincer. La peau de chamois pour essuyer sans faire de trace.

Il avoue qu'il met une heure à tout épousseter chaque semaine. Mon épouse me dit que je suis ridicule et que je ferai mieux de passer l'aspirateur dans la maison. C'est pour cela que je les ai mises dans mon bureau. Ici, personne ne peut entrer, à part moi et les auteurs. Je souris.

On a tous une voiture dans son cœur dit l'éditeur. Je suis ému, plus que ne le voudrait la simple contemplation d'une voiture en plastique. L'Ami 6, elle est blanche comme celle de mon père. Les portières s'ouvrent et on peut ouvrir le capot pour découvrir le moteur.

A trois, tu appuies. L'Ami 6 a des démarrages difficiles l'hiver. Quand je démarre, tu appuies mais tu vises bien l'entrée du filtre à air dit Papa. Il faut injecter du « Starpilote », produit magique pour stimuler les moteurs frileux. Je suis sérieux comme un mécanicien de stand de formule 1. La voiture hoquète, j'appuie pour diffuser le produit, le moteur broute, toussote, démarre. Ou pas.

L'Ami 8 de chez Citroën est moins recherchée par les collectionneurs que l'Ami 6 mais je l'ai aussi, en bleu. L'éditeur montre du doigt une étagère un peu plus haut.

Ce n'est pas pareil, je dis. Je n'aime pas beaucoup l'Ami 8. L'Ami 6, on l'a eue pendant 13 ans, puis mon frère l'a récupérée, elle a durée encore 5 ans !

Quand elle ne démarrait pas, fallait la manivelle.

Ecarte bien les jambes, dit Papa, parce que la manivelle si elle te revient, elle peut te casser les jambes d'un coup. Clac. J'écarte les jambes.

J'ai eu mes cinq francs pour le lavage.. Toute peine mérite salaire. C'est aussi que tout salaire mérite un travail.

Il faudra retravailler le texte bien sûr, modère l'éditeur, mais j'ai beaucoup aimé cette idée d'un homme qui vend sa mémoire. Non pas qu'il écrit ses mémoires mais qu'il la vend comme certains dans les pays pauvres vendent un rein ou même une cornée. Mais pourquoi ?

Jean-François, réveille-toi, on va partir. On part en vacances, au milieu de la nuit, on a froid, on a 13 heures de route devant nous.

J'explique un peu, il abandonne tout ce qu'il a été, en quelque sorte, il vend cela à ceux qui veulent une histoire personnelle toute fraiche. Ceux qui veulent de la mémoire-réalité, pas des romans.

A peine partis, je demande déjà si on est bientôt arrivés. Dors dit mon frère assis à côté de moi. On est bientôt arrivés ? Prends un livre dit ma mère.

Vous pensez que des gens achèteraient des souvenirs ainsi ? 

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