Bienvenue sur le blog de mes stages et ateliers  d'écriture !

Textes écrits par des participants à mes ateliers et à mes stages d'écriture, manifestations littéraires, concours... 

Dernière publication

Sylvie Reymond Bagur
03 mai 2024
Livres

J'ai le plaisir de vous annoncer la publication d'un recueil de nouvelles d'Hélène Delprat, fidèle participante aux ateliers. Il s'intitule "Parfois l'histoire est courte" Disponible en format numérique ou papier, il sera bientôt diffusé chez de nombreux libraires.  Amateurs de n...

Mon autre blog littéraire

Des articles sur l'écriture, des conseils, des exemples, des bibliographies et mes propres textes. Ci-dessous, les derniers articles publiés.

Visitez mon blog

Dernier article paru
Dernier article paru

Orwell et le langage

Le langage contemporain aurait-il quelque chose d'orwellien?

Lire

Taille du texte: +

​Visages de la vogue

Texte sur l'écriture des visages Atelier Écrire le visage

Fini la chanson des fléaux et les animaux qui « chauchent » les gerbes sous le soleil de juillet, les hommes aux visages craquelés, couleur de terre, ont déposé leurs outils. Un suaire de sueur les recouvre, mais pour l'heure les yeux s'allument, les regards s'ébrouent et de ces silhouettes de ruine montent un brouhaha de voix rieuses… un peu de répit et la fête peut commencer. Cette année-là, j'avais décidé de participer à l'évènement, tu m'avais promis de venir dans la soirée. Dans cette bourgade, où l'unité de mesure du nombre d'habitants est la quantité de feux allumés l'hiver, chacun mettait un point d'honneur à se mettre sur son trente et un. Les visages reluisaient comme des sous neufs, les « brailles » étaient lavées et repassées de frais. Les quatre heures annoncées par la cloche invitaient la population à se rassembler sur la place. Dans le virage, sous l'église, le hennissement des chevaux et le cataclop tonitruant des pattes qui foulent le sol annoncent la venue du Marcel et du René suivi de tous les mômes du village. Chaque année les deux percherons lancés à belle allure donnent le départ de la Vogue. « Viva la voto » crie d'une voix rocailleuse le Marcel et tout le monde de répéter « Viva la voto »… la fête était lancée. Le Marcel c'est quelqu'un comme on dit. Il ne faut pas lui en promettre, ici quand on dit « le » c'est qu'on est du pays, et s'il y a plusieurs Marcel on ajoute la particule « de »… ça vous pose l'homme dans son terroir. Donc le Marcel de Chantemerle a fait son entrée. Un grand gaillard solide, dur à la tache, aussi rond que son percheron, un regard bleu acier sous des cheveux raides et épais comme les genets de la montagne, son visage semble taillé à la serpette qu'il sait manier mieux que personne. Quant au René, il est tout rabougri ; on dirait une brindille sur son cheval ! Ses sourcils en broussailles se mélangent à une tignasse qui fait honneur à la crinière de son destrier, ses yeux noirs luisent au milieu d'une figure burinée par le soleil, c'est qu'être berger ça vous tanne un homme. Petit à petit la place se remplit.

Ça et là des visages rougeauds s'exaltent, luisants comme des tomates, avec des joues aussi polies que les galets de la rivière. Des peaux parcheminées, papier bible où l'histoire des hommes se lit, des taches de rouille qui disent le temps passé. Des queux de cheval pointent, des chignons hauts s'érigent, champignons capillaire, des chignons bas, petits nids aux creux d'une nuque arbre, du gris, du blanc, du noir, des yeux fardés façon biche, du rouge à lèvres éclatant, des yeux qui cherchent, et évaluent les chances d'être regardé, admiré. Je me fraye un passage au milieu des danseurs, frôle des nuques rouges mordues par le soleil, des odeurs de vinasse se mêlent à celle de l'eau de Cologne ambré Mont Saint-Michel, l'écorce rugueuse des peaux me râpe. Là un beau gosse sous une casquette gavroche, des yeux rieurs, veloutés, un rien coquins entourés de rides en soleil me font un clin d'œil ; ici une chevelure rousse qui s'envole et laisse voir des oreilles en coquillages, me bouscule. Une moustache rehaussée d'yeux globuleux, la pelouse grasse d'une barbe, un front en fer à cheval, et des trous de nez gigantesques s'approchent de moi… tant de laideur sur une seule face ne peut que me rappeler combien notre condition humaine est fragile, absurde et mortelle. Je me sauve, m'échappe de cette gangue de peaux et monte sur le clapas à l'abri. Je me sens presque en communion avec le buisson de buveurs debout devant le comptoir. La rudesse de la terre a mangé les vingt ans de ces êtres qui, pour oublier la fatigue, boivent, fument dans des relents de désespoirs. Au milieu des râles de rire et des remords d'insultes, chacun fait sa fête de l'intérieur. Il est tard, tu ne viendras pas ce soir. La fin des festivités a parfois un goût de cendres. 

​Self vie
Transparente

Sur le même sujet:

 

Commentaires 1

Invité - Camille L. le mercredi 10 janvier 2024 11:02

Très beau !

Très beau !
Déjà inscrit ? Connectez-vous ici
vendredi 3 mai 2024

Textes à redécouvrir

16 mai 2022
Alors que beaucoup pensent que tu es une femme infréquentable, à garder loin de soi, une étrangère à enfermer derrière des murs, pour s'en protéger, e...
612 lectures
9 juin 2023
Passage, Elle crie, crabe démembré, dans un bouillon de poussière safranée. La carapace en merisier craque sous la semelle opiniâtre d'un pied besogne...
435 lectures
14 décembre 2019
Il courait lentement sur le chemin de pierres molles qu'il avait maintes fois parcouru en rentrant de l'école. Ce paysage familier lui était étrange, ...
1314 lectures

Phrases d'auteurs...

"Le romancier habite les seuils, sa tâche est de faire circuler librement le dedans et le dehors, l'éternité et l'instant, le désespoir et l'allégresse."  Yvon Rivard

" La vie procède toujours par couples d’oppositions. C’est seulement de la place du romancier, centre de la construction, que tout cesse d’être perçu contradictoirement et prend ainsi son sens."  Raymond Abellio

"Certains artistes sont les témoins de leur époque, d’autres en sont les symptômes."  Michel Castanier, Être

"Les grandes routes sont stériles." Lamennais 

"Un livre doit remuer les plaies. En provoquer, même. Un livre doit être un danger." Cioran

"En art, il n’y a pas de règles, il n’y a que des exemples." Julien Gracq, Lettrines 

"J'écris pour me parcourir. Peindre, composer, écrire : me parcourir. Là est l'aventure d'être en vie."Henri Michaux

"La littérature n’est ni un passe-temps ni une évasion, mais une façon–peut-être la plus complète et la plus profonde–d’examiner la condition humaine." Ernesto Sábato, L’Ecrivain et la catastrophe

"Le langage est une peau. Je frotte mon langage contre l'autre. " Roland Barthes, Fragments d'un discours amoureux 

 

 

Mots-clés

Absence Adresse Afrique Allégorie Alpinisme Amour Anaphore Animal Antonin Artaud Attente Auteur participant aux ateliers Autoportrait Baiser Bateau Blaise Cendrars Cadre Campagne Christian Bobin Chronologie Cinéma Construction Corps Couleur Couleurs Couple Course Covid Description Désert Désir Dialogue Diderot Douleur Ecrire Ecrire ailleurs Ecriture automatique Emmanuel Berl Enfance Enumérations Ephémère Epiphanie Erotisme Exil Fable Faits divers Faulkner Felix Fénéon Fenêtre Fête Fiction Filiation Flux de conscience Folie Fragments Gabriel Garcia Marquez Gestes Giono Guerre Haïkus Henri Michaux Humour Idiomatiques Ile Imaginaire Inceste Indicible Instant Japon Jardin Jean Tardieu Jeu Julio Cortázar Langue Laurent Gaudé Légende Léon Bloy Lieu Littérature américaine Main Maternité Mauvignier Médias Mémoire Métaphore Métro Miroir Moment historique Monologue Intérieur Monuments Mort Mots Mouvement Musicalité Musique Mythe Mythes Narrateur Noms de personnage Nourriture Nouvelles Novalis Nuit Numérique Objets Odeurs Oxymores Pacte de lecture Paternité Patio Paysage Peinture Personnage Photo Phrase Phrases Poésie Point de vue Polyphonie Portes Portrait Printemps des poètes Projection de soi Quotidien Raymond Queneau Récit d'une vie Recueil de nouvelles Réécriture Rencontres Résilience Rituel Roman Romantisme Rythme Scène Science-fiction Sculpture Secret Sensation Sève d'automne Silence Soir Solitude Son Souvenir Sport Stages Steinbeck Stupéfiants Style subjectivité Sujets d'actualité Synesthésie Synonymes Téléphone Témoignage Temporalité Texte avec "tu" Textes écrits à plusieurs Tobias Wolff Vieillissement Ville Visage Voix Voyages Voyeur Zola Zoom